« Ce n’est pas à une entreprise de dicter à la République comment elle doit réformer les choses »


Mark MacGann, ancien lobbyiste d’Uber, a transmis au quotidien britannique « The Guardian » les 124 000 documents internes de l’entreprise désormais connus comme les « Uber Files ».

Depuis le 10 juillet, Le Monde et ses partenaires du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) ont publié une série de révélations sur les « années folles » du développement d’Uber en France. Ces informations s’appuient sur plus de 124 000 documents internes de l’entreprise, transmis au quotidien britannique The Guardian par un lanceur d’alerte, ex-cadre d’Uber, dont il était un des principaux lobbyistes : Mark MacGann. Ces « Uber Files » montrent notamment une grande proximité de l’entreprise avec le ministre de l’économie de l’époque, Emmanuel Macron, qui souhaitait « faire en sorte que la France travaille pour Uber afin qu’Uber puisse travailler en et pour la France », selon un propos de M. Macron tiré du compte rendu d’une réunion confidentielle.

Les documents illustrent aussi les pratiques d’une entreprise menant un lobbying particulièrement agressif, auprès de parlementaires français comme de commissaires européens, et dont la stratégie assumée était de maintenir en activité des services illégaux, comme UberPop l’était en France, pour peser dans les négociations avec les gouvernements. Pour la première fois en France, M. MacGann évoque, pour Le Monde, Radio France et France Télévisions, ses motivations et les révélations issues des « Uber Files ». Il livre sa propre lecture de ces événements, dont la mise au jour a provoqué de vives réactions à gauche à l’égard du chef de l’Etat.

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Pourquoi avez-vous décidé de transmettre les documents des « Uber Files » à la presse ?

Parce que je pense que le pouvoir démesuré de certaines entreprises de technologie pose un problème pour notre démocratie. Je suis un grand fan d’Uber. Je trouve que c’est une technologie magnifique. J’ai cru dur comme fer qu’on allait pouvoir aider les gens à mieux vivre leur ville, à mieux se déplacer en toute sécurité à un prix tout à fait raisonnable, qu’on allait donner sa chance à des millions de personnes jusqu’alors invisibles. Des gens qui, en général, n’avaient pas le bac, n’avaient pas fait d’études, mais qui étaient prêts à travailler jour et nuit pour nourrir leur famille et pouvoir évoluer dans la vie.

Quand je regarde maintenant comment les choses ont évolué, je me dis qu’il était important que je dise ma vérité. Pas pour critiquer l’entreprise Uber d’aujourd’hui, mais pour dire à ces gens qui se sentent laissés pour compte qu’on peut mieux faire.

Qu’avez-vous voulu dénoncer ?

La fragilisation de notre modèle social. J’ai fait partie des dirigeants d’Uber dont le travail était de convaincre les gouvernements de changer le système réglementaire et législatif. Mes discussions avec des chauffeurs, et surtout ce que je lis dans la presse, me montrent qu’il y a un malentendu entre le rêve qu’on avait vendu aux chauffeurs et la réalité d’aujourd’hui.

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